Retrouvez la vidéo des extraits du Rimes and Blues de l’Homme Chouette, les textes inédits de « L’espèce humaine » et de « Route 65 et demi » et, en bonus, la version blues de « Humain qui aime » !
Route 65 et demi
Route 65
Tu as roulé
Toute la nuit
Trop vite
Route 65 et demi
Le matin t’a surpris
A sec
Pas de lendemain
Sur la route 66
Panne de sexe
De rêve américain
Route 65 trois-quart
Trop tard
A l’horizon
Aucune station-service
Toute est bidon
Mirage 66
Des trous dans le goudron
Pas drôle
Des flaques neurasthéniques
Plus de pétrole
En Amérique
Une batterie qu’est-ce ?
Sinon le sang qui pulse
La tête qui bascule
Quand le pouls bat
Une batterie qu’est-ce ?
D’autre qu’un corps qui vibre
Quatre membres libres
Et le bruit de nos pas
Une basse qu’est-ce ?
Sinon une respiration
L’amplitude d’un poumon
La voix du dedans
Une basse qu’est-ce ?
D’autre que le souffle du monde
Des notes profondes
Les soupirs d’un enfant
Une lead guitar qu’est-ce ?
Sinon un cri du coeur
L’exclamation d’un noceur
Dans la chaleur des restes
Une lead guitare qu’est-ce ?
D’autre que l’exaltation
D’un fabuleux gratteur
Pour la peau d’une grosse caisse
Une voix d’humain qu’est-ce ?
Sinon la portée d’un pont
Par-dessus le gouffre sans fond
De nos amours humaines
Une voix d’humain qu’est-ce ?
D’autre qu’un instrument
Les sentiments ciment
De nos vies sur scène
Bar saloon
Mec salaud
Ta botte glisse
Lasse sur la piste
La grasse guitare
Louche glousse
Dans un bouge
A Memphis
Une fille
Peu salope
S’affole en délice
Défie les fils
Mère patrie
Pères partis
Délie les fils
D’une danse d’ici
Mélodie rance
Mélancolie
D’un blues band
Puisque l’oncle Sam
Qu’il n’y a pas de montagne
Au-delà des Appalaches
Où aucun cowboy ne gagne
Je ne suis pas guitare manchot
Je ne suis pas chanteur héros
J’écrase mes doigts
Sur quelques mots
Je m’égare d’émoi
En mélodie bistrot
L’espèce humaine
S’extrayant de l’espèce humaine
On pourrait se croire belge
Et défendre la Belgique
Léopold II et la chicotte
Les mains coupées
Ils n’étaient pas racistes à l’époque
Ils exportaient la civilisation
Le caoutchouc l’uranium du Congo
Il fallait nourrir
Le ventre de la deuxième économie mondiale
L’automobile et le macadam
La première locomotive
Les carrés de mine
Le charbon et l’acier
La carrure de la métallurgie
Les fils de John Cockerill
Les femmes les armes de la FN
Et une balle pour Lumumba
S’extrayant de l’espèce humaine
On pourrait se croire belge
Et humaniste
Royaume magnanime
Octroyant une indépendance triste
A cette noire république
Qu’ont-ils fait de nos routes de nos ponts
De nos écoles et hôpitaux publiques
Diraient d’anciens irritables colons
L’ivoire sculpté en souvenir
Sur la commode du salon
Qui a mangé
L’or du Katanga
Les diamants du Kasaï
Qui a souillé les eaux sombres du Kivu
La terre des ancêtres
Qui a brisé les sagaies
Revanche frustrée
Et violence affamée
N’ont pas d’oreilles
S’extrayant de l’espèce humaine
On pourrait se croire sur scène
Premier violon
Dans le concert des Nations
S’extrayant de l’espèce humaine
On pourrait se croire congolais
Ou zaïrois
Bakongo ou Baluba
Héritier du royaume du Kongo
Enfants des rues à Kinshasa
Victime du ravage des blancs
Ou guerrier pygmée géant
S’extrayant de l’espèce humaine
On pourrait se croire propriétaire du ventre de la terre
Du vagin des femmes
De l’âme des enfants
Pour quelques caisses de kalachs
Conquises à la machette
Par un Léopold véreux
A la civilisation mercantile
Par un léopard miteux
Aux larmes de crocodiles
Par des voisins envieux
Pressés de se servir sur le fil
Par des néocolonialistes vicieux
A l’abri dans leurs grandes villes
Rêvant de presser le jus miteux
De peuples jamais assez serviles
S’extrayant de l’espèce humaine
On pourrait se croire français ou antillais
Rhum ou camembert
Russe ou américain
Communiste déchu ou déchet capitaliste
Libyen ou Érythréen
Italien ou marocain
Chassé par le soleil ou la misère
Gentil belge ou fier congolais
Royaume ou république
Bruxellois ou parisien
Kinois sinon rien
Universel ou unique
S’extrayant de l’espèce humaine
On pourrait semer les mythes que l’on sème
Inégalité et aliénation
Graines d’espoir et de révolution
Je ne serai pas plus long
Ceci n’était qu’un extrait
Des humaines aversions
Je ne serai satisfait
Que lorsque nous comblerons
Les gouffres de l’exploitation
Et je ne me tairai
Que lorsque l’imagination
Changera l’image noire des nations
En territoires du vrai
Parler en paix
C’est bâtir des ponts